L’avortement, parlons-en !

Article : L’avortement, parlons-en !
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21 septembre 2017

L’avortement, parlons-en !

Julie avait 17 ans, elle était belle et d’un teint naturel cacao brillant. Elle était très intelligente. On l’appréciait tous. On était tous un peu amoureux d’elle. Mais, à l’approche des examens du BAC, sans vraiment faire exprès, tous, on avait remarqué que ses rondeurs s’affirmaient davantage. Boursouflures, arrière-train, et même les abdos semblaient dorénavant dessiner une élégante calebasse. Depuis lors, elle semblait toujours malade et fatiguée. Elle était constamment entourée de ses amies qui semblaient toujours faire des messes basses. Après cet épisode, Julie avait semble t il eu un repos maladie d’un mois. Un jour, à une semaine des examens officiels, l’éducatrice de niveau nous apprenait que Julie avait cassé sa pipe. Julie, dans la quasi-ignorance de ses parents, avait ingurgité plusieurs litres de Coca et des médicaments. Elle voulait l’avortement.

L’avortement, l’ultime recours…

L’avortement, on connaît tous. Ou du moins, on en a tous entendu parler. C’est cette pratique qui consiste à interrompre délibérément une grossesse. D’après mes recherches, je dirai qu’une importante majorité d’Africains sont publiquement et ouvertement contre l’avortement. Cependant, à bien regarder de plus près, on se rend compte que l’avortement est toléré voire même admis. En Afrique, l’avortement semble ne pas être revendiqué comme un droit (celui de disposer de son corps). Il semble être l’ultime recours à une contrainte sociale, économique, culturelle, et même politique.

Ce n’est plus un secret pour personne. Plusieurs jeunes filles, même élèves et étudiantes, ont recours à la pratique de l’avortement pour de multiples raisons. Elles le font par crainte d’interrompre leurs études, d’être stigmatisée, par manque de moyens financiers, etc. Ceci même au péril de leur santé et de leur vie. Car, les techniques au noir pour le faire font froid dans le dos. On connaît tous, au moins un à deux cas dans notre entourage et qui parfois ont très mal tournés.

Alors, dans le cas de la Côte d’Ivoire, pour préserver la santé et les vies humaines, serait-il judicieux pour le gouvernement de lever officiellement l’interdiction et encadrer la pratique de l’avortement ?

La toile de fond, le problème de l’éducation à la sexualité…

Au-delà même de la question de l’avortement, un autre problème se dissimule. Celui de l’éducation à la sexualité. Dans les mosquées et les églises, la question semble tranchée à ma connaissance : l’abstinence jusqu’au mariage. L’éducation à la sexualité se fait à l’endroit des futurs époux. Mais dans la société ivoirienne en général de plus en plus décomplexée, l’éducation à la sexualité est-elle faite ? Qui des parents, des éducateurs scolaires, des éducateurs sociaux doit faire ce travail d’éducation ? Qui doit donc être jugé responsable des grossesses précoces et avortements, le garçon, la fille, les parents ou l’Etat ?

Quoiqu’il en soit, ce sont des questions auxquelles tous nous devons répondre. Pour rappel, pour la seule année scolaire dernière en Côte d’Ivoire, environ 4 500 cas de grossesses en milieu scolaire avaient été officiellement recensés. Dieu seul sait combien ont fini dans des latrines et dans les bacs à ordures.

Quelques propositions…

C’est pourquoi, l’éducation à la sexualité doit d’abord être une affaire des parents. Dans leur rôle premier d’éducateur, ceux-ci doivent discuter sans sans subterfuges et sans faux-fuyants de la question avec leurs adolescents afin de mieux les préparer à entrer dans la vie d’adulte responsable.

Ensuite, nous, ami(e)s, camarades d’école, voisins de quartier, personnel éducatif, bref en tant que membres de la communauté, nous devons tous comprendre et être capable de faire comprendre qu’une grossesse n’est pas une fatalité. Il faut donc éviter la stigmatisation immédiate et penser au bien-être de la personne présente et de la personne à venir.

Enfin, espérons aussi que le gouvernement ivoirien prenne les mesures nécessaires pour endiguer ce fléau qui nuit gravement à l’éducation de la jeune fille et freine la marche supposée de ce pays vers l’émergence.

En définitive, ce n’est pas aux étudiants et élèves qui manifestent contre les coûts élevés d’inscription académique qu’il faut opposer une « ruposte sauvage ». Bien au contraire, c’est au problème des grossesses précoces et à sa célèbre conséquence l’avortement qu’il faut opposer des mesures efficaces et réalistes.

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