Ruben BONI

Côte d’Ivoire : des étudiants en danger de mort par intoxication à l’hydrocarbure

Le 14 février 2023, l’étudiant Fabrice Zoussi, résident à la cité universitaire 2 de Port-Bouët, décède d’une maladie infectieuse fulgurante. Une association de protection de l’environnement dénonce une intoxication à l’hydrocarbure. Pour elle, la cause du décès serait la promiscuité d’une entreprise de traitement d’hydrocarbures avec les dortoirs universitaires. Des centaines d’étudiants encourent de même une intoxication voire la mort. Des mesures urgentes sont réclamées.

Fabrice Zoussi, un autre étudiant décédé dans des conditions troubles

Étudiant modèle, Fabrice Zoussi était connu de tous pour son éloquence. À chacune de ses prises de parole, il forçait son auditoire à un balancement des têtes en signe d’acquiescement. Ses postures de réflexion et ses interventions d’une grande pertinence lui donnaient un air d’intello conscient de ses capacités. À tous, il ne cachait pas ses ambitions. Il se voyait docteur recruté puis enseignant chercheur en droit. Pour vivre son rêve, Fabrice savait prendre le temps de la discipline studieuse. Aussi, au-delà de sa personne, Fabrice avait un sens élevé de l’altruisme. Volontairement, il n’hésitait pas à apporter de ses lumières à ses ami.e.s dans la préparation de leur soutenance de mémoire.

Fabrice Zoussi en plein exposé.
Crédit image : Réseau Ivoirien des Leaders (RIL)

Au niveau social et politique, petit à petit, Fabrice posait les jalons pour être un jour élu de la nation. Il entendait travailler au bien-être des populations. Il envisageait défendre une proposition de loi pour une protection renforcée de la forêt du Banco et des aires classées. Deux ans avant son terrible destin, il semblait suffisamment mesurer tous les enjeux de vivre dans un environnement sain.

Un droit qui semble lui avoir été dénié après plusieurs années de vie à la cité universitaire 2 de Port-Bouët. Fabrice décédera dans des conditions troubles de maladie. Ses médecins traitants lui diagnostiqueront des symptômes infectieux mystérieux. En un court laps de temps, ses poumons auraient été sévèrement endommagés

Des hydrocarbures à proximité d’une cité universitaire, un danger de mort en cascade

Pour l’Association Citoyenne pour la Protection de l’Environnement en Côte d’Ivoire (ACPE-CI), il n’y a aucun doute. La faute est remise à la contiguïté des activités de manutention d’une station-service d’hydrocarbure avec la cité universitaire 2 de Port-Bouët. En effet, selon les observations de l’association, les hydrocarbures traités dans la zone universitaire seraient d’une grande toxicité. Ils présenteraient une « forte teneur en soufre et autres Composés Organiques Volatils (COV) ». Ce qui, pour elle, constitue un danger certain de morts fulgurantes programmées de plusieurs centaines d’étudiants résidents dans ladite cité.

Correspondance de l'ACPE CI adressée à l'administration universitaire. Elle dénonce le risque d'intoxication à l'hydrocarbure.
Crédit image : Page Facebook ACPE CI

Selon une foison de publications scientifiques telles que celle de Dr. Gerald O’Malley et de Dr. Rika O’Malley, « Les hydrocarbures sont des produits pétroliers, tels que l’essence et le kérosène [..] qui sont dangereux lorsque les émanations sont inhalées ou que le liquide pénètre dans les poumons. ». Pour les scientifiques, « Le fait d’avaler ou d’inhaler des hydrocarbures peut irriter les poumons et causer une toux, une suffocation, un essoufflement et des problèmes neurologiques. Inhaler ou respirer les vapeurs de ces produits peuvent entraîner des battements de cœur irréguliers, une accélération du rythme cardiaque ou une mort subite, en particulier après un effort physique ou en cas de stress. ».

Autant de travaux qui confortent l’ACPE-CI dans sa position de dénonciation d’un risque élevé d’intoxication de centaines d’étudiants. Les images de réjections de toux et les témoignages recueillis concernant les symptômes présentés par Fabrice semblent quasi similaires aux observations des scientifiques. Selon l’association, plusieurs étudiants de ladite cité sembleraient souffrir de plusieurs symptômes décrits par les chercheurs.

Une terrible image des rejections de toux de Fabrice.
Une image de rejection de toux de Fabrice. Crédit image : Page Facebook ACPE CI

Des mesures urgentes s’imposent pour stopper l’intoxication

Dans ce contexte de suspicion, de lien de causalité entre la présence supposée d’hydrocarbures à proximité de la cité universitaire 2 de port Bouet et le mystérieux mal qui semble frapper les étudiants, il apparaît important de prendre des mesures conservatoires urgentes.

En effet, les autorités compétentes ayant été saisies par le truchement de l’association ACPE-CI, il apparaît logique qu’en premier, soit rapidement diligentée une enquête en vue de jauger les allégations rapportées par les étudiants. Ensuite, s’il s’avère que le lien de causalité entre la présence des hydrocarbures à proximité de la cité universitaire occasionne des nuisances olfactives et de santé, il serait tout à fait logique d’obtenir dans les plus brefs délais la fermeture et la relocalisation des activités de l’entreprise indexée. Enfin, une prise en charge sanitaire toute aussi urgentes des étudiants se réclamant victimes devra nécessairement être garantie. Cela, sans exclure des procédures de poursuite judiciaire à l’encontre des acteurs impliqués dans l’intoxication des étudiants. Intoxication qui pourrait avoir été source du décès prématuré d’une pépite ivoirienne défenseuse du droit à un environnement sain. J’ai nommé mon regretté et cher filleul Fabrice Zoussi.

Alors que l’an 2023 a été officiellement déclaré « année de la jeunesse », aucun étudiant de ladite cité n’a de doute concernant une réponse adéquate du gouvernement. Tous sont convaincus que le gouvernement mettra tout en œuvre pour résoudre durablement la situation de psychose d’intoxication à l’hydrocarbure.

A lire aussi — Côte d’Ivoire : plaidoyer pour un musée souvenir des crises sociopolitiques


Côte d’Ivoire : plaidoyer pour un musée souvenir des crises sociopolitiques

Le 19 septembre de chaque année en Côte d’Ivoire est une date mémorable. A cette date, selon leur propre vision des évènements, quelques internautes rappellent le souvenir de la rébellion armée. Celle qui a occupé et divisé le pays en deux durant huit ans. Dans le flot des souvenirs qui ressurgissent, on peut subtilement entrevoir une société ivoirienne encore polarisée. Dans l’optique d’éviter une énième situation de tragédie, dans ce billet, nous tenons un argumentaire particulier. Nous proposons la création d’un musée du souvenir des crises sociopolitiques qui ont marqué l’histoire du pays.

Psychanalyse d’une société ivoirienne

« Un peuple qui oublie son passé se condamne à le revivre », disait Winston Churchill. Il y a de cela 19 ans aujourd’hui que la Côte d’Ivoire connaissait une rébellion armée. Pour certains, clairement, cette date rime avec fière revendication et affirmation de son identité niée. Pour d’autres, par contre, elle est synonyme de douleur et d’horreur gratuite. Un peu comme les deux facettes d’une même pièce de monnaie, le 19 septembre continue d’opposer les points de vues. Elle oppose au sein des générations d’Ivoiriens sans réellement en ressortir une leçon commune à garder.

Ainsi, sous les expressions de farceurs et volontairement moqueuses d’une société ivoirienne, couvent de graves blessures sociales. Et aussi des traumatismes jamais vraiment pansées. On vit l’un à côté de l’autre sans véritablement vivre la vraie fraternité décrite dans l’hymne national ivoirienne. Le psychologue dirait qu’il faut pour cela à la Côte d’Ivoire une psychanalyse générale. Allusion faite à la technique inventée par Freud permettant au patient d’explorer son inconscient pour essayer de résoudre les conflits qui remontent à son enfance et pèsent sur son existence.

Un musée pour garder le souvenir de son tragique passé

Pour ma part, le processus de renaissance de la Côte d’Ivoire pourrait se faire au travers d’une décision forte. Celle de créer une institution : le mémorial du souvenir des crises successives qu’a connu le pays. En effet, l’étude de l’histoire politique démontre que la Côte d’Ivoire indépendante a connu diverses crises. Les points culminants de ces crises ont été atteints en 1993, 1999, 2002 et 2010. Le lourd passif hérité de ces dates reste encore à vider. Il faut le vider avec méthode et stratégie.

Comme pour le génocide Rwandais, il faut à la Côte d’Ivoire sa propre maison du souvenir dédiée aux crises sociopolitiques. Ce musée du souvenir, œuvre du travail impartial de recherche de divers chercheurs, pourrait rassembler avec intelligence les faits historiques. Le but étant de transmettre des valeurs de tolérance et de vivre ensemble. Ce musée dédié pourrait ainsi veiller à préserver la mémoire de ces périodes tragiques. Pour que les souffrances endurées par les peuples et communautés de Côte d’Ivoire ne tombent pas dans l’oubli.

Eduquer à la manifestation d’un comportement de tolérance et de paix

Ce musée ou mémorial, lieu pédagogique, pourra certainement accueillir de nombreux visiteurs. Il pourrait leurs permettre de découvrir, grâce à des spectacles, des scénettes, des récits, des sculptures, des tableaux, des chants récents ou de l’époque, des animations numériques, des panels, des conférences, de la documentation, des explications de guides, etc. les histoires tragiques du pays, afin d’éduquer les citoyens de tout âge à la manifestation d’un comportement de paix.

J’aurais aussi voulu proposer que des individus de bonne volonté puissent mettre en place un tel musée ou mémorial. Mais eu égard aux risques de récupération politique, une institution nouvelle serait l’idéal pour porter le projet de musée.

Pour finir, je ne peux m’empêcher de penser à la « loi de la duplication historique » de Karl Marx. Le philosophe affirmait en des termes à peu près semblables que tous les grands événements de l’histoire se produisent pour ainsi dire deux fois. La première fois comme une grande tragédie, la seconde fois comme une farce sordide. Dans le cas de la Côte d’Ivoire, je me demande encore si la tragédie a suffisamment été atteinte. Quoiqu’il en soit, je ne souhaite pas que l’histoire du pays s’écrive comme une farce sordide. Pour cela, un lieu de mémoire collective me semble être utile pour mieux apprendre des expériences du passé.

Revivons en image, un certain angle vue de l’histoire politique tumultueuse de la Côte d’Ivoire.

Pour le souvenir, revisitons l’angle de vue présenté le 06 avril 2011 par TV5 Monde
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Coronavirus en Côte d’Ivoire : Plaidoyer en faveur du système de santé

Le 10 mars 2020, le ministère ivoirien de la Santé enregistrait un premier malade porteur du coronavirus (Covid-19). Depuis, chaque jour, de nouveaux malades sont enregistrés. Dans l’urgence, des mesures gouvernementales sont prises. Mais, absurdement, les structures sanitaires et leur personnel semblent être les grands oubliés de ces mesures. Et pourtant, les agents de santé sont le dernier rempart contre la désastreuse pandémie.

25 mars 2020, en Italie, la maison de haute couture Giorgio Armani faisait une belle annonce. Elle annonçait dédier ses usines de production à la fabrication de combinaisons médicales à usage unique. Ces combinaisons serviront à protéger le personnel médical en contact quotidien et direct avec le Covid-19. Rapporte l’Agence France-Presse sur son compte Twitter.

Sauvons des vies, équipons les centres médicaux !

Devant une telle information, difficile de ne pas penser à la situation des agents de santé de son pays. En effet, malgré les réformes engagées, le système de santé est encore à la peine en Côte d’Ivoire. Un rapide tour dans les centres hospitaliers universitaires (CHU) permet de faire un amer constat. Les agents de santé ne disposent pas des équipements de protection nécessaire pour faire face à la pandémie du coronavirus.

Et pourtant, les chiffres concernant le nombre de personnes atteintes par le COVID-19 ne cessent de grimper. Chaque jour, c’est en moyenne une dizaine de cas qui se font enregistrer. Ainsi, inévitablement, les malades afflueront en masse dans les centres de santé de proximité déjà surchargés.

Les hôpitaux ivoiriens, il faut le noter, souffrent de l’insuffisance et de la vétusté de ses équipements sanitaires. Le personnel soignant est lui aussi largement insuffisant. En 2017, Jeune Afrique rapportait que la Côte d’Ivoire affichait un médiocre ratio d’un médecin pour près de 6 000 habitants. Aussi, la même année, il a été révélé que 20 % des patients admis aux urgences du CHU de Cocody y décèdent.

Difficile alors de s’imaginer aujourd’hui que la situation ait changé. Pire, elle s’est sûrement aggravée suite à la fermeture pour travaux d’un des trois CHU d’Abidjan. Il faut donc rapidement augmenter ou acquérir du matériel important pour l’assistance des malades du coronavirus. Une partie du budget de 95 milliards 880 millions annoncé par Alassane Ouattara devrait servir à cela.

Stoppons le coronavirus, offrons des combinaisons médicales !

Le coronavirus est une maladie contagieuse. L’agent de santé, non équipés de tenues de protection adaptées, est exposé à une contamination par le patient malade. Auscultant plusieurs dizaines d’usagers de la santé par jour, l’agent de santé infecté est un formidable vecteur de la maladie.

Pour ceux qui ne le savent pas, le lavage des mains a d’ailleurs été institué comme un principe médical en raison d’un constat. Les médecins, personnes censées sauver des vies, étaient des vecteurs de morts. Par ignorance, ils ne se lavaient pas les mains après avoir examiné des malades. Ainsi, involontairement, ils répandaient des germes mortels à d’autres patients. Le lavage des mains est aujourd’hui démocratisé.

Se laver les mains sauve des vies.

Devant le péril imminent dû au Covid-19, la mise à contribution des sociétés du plastique devrait être une option. L’État pourrait ainsi négocier et obtenir de certaines entreprises privées la confection de combinaisons adaptées aux besoins des agents de santé. Car, l’achat et la livraison de combinaisons médicales pourraient prendre plusieurs semaines ou ne jamais arriver. En témoigne l’affaire de la confiscation de milliers de masques envoyés à l’Italie par la Chine. Et aussi, pourquoi pas associer les stylistes et les nombreux couturiers de renommée continentale ou même de quartier que nous avons. Ce sont des choses tout à fait possible, à mon sens.

Plaidoyer pour sauver des milliers de vies…

Les agents de santé sont quelque part la dernière ligne de défense humaine contre cette pandémie du coronavirus. Ils ont juré de sauver des vies humaines. Dans le contexte ivoirien, on n’ose pas pas imaginer le scénario d’une infection du personnel de santé par manque d’équipement de protection adapté. Dans un tel cas de figure, ne serait-il pas légitime pour eux de décider de fermer les centres de santé pour refuser de répandre la mort ? Dilemme. Quel que soit le cas envisagé, les conséquences seraient désastreuses.

Alors, tous, en Côte d’Ivoire ou ailleurs, nous avons donc intérêt à faire le plaidoyer pour de meilleurs conditions de travail des agents de la santé. Avec l’aide de Dieu, ensemble nous y arriverons ! Agissons et interpellons pour sauver des vies !

A lire aussi : Côte d’ivoire, l’extinction de la biodiversité en marche à grand pas

Des conseils utiles pour se protéger du coronavirus.


#VraieFemmeAfricaine, le hashtag ironique qui libère la parole de la femme sur sa condition

Pour commémorer la journée internationale des droits de la femme, en lieu et place des défilés en uniforme pagne, des femmes ivoiriennes ont choisi une autre approche. Elles ont ainsi décidé de tordre le cou aux préjugés sociaux relatifs à la condition de la femme. Sur les réseaux sociaux, ces femmes s’expriment et conscientisent au travers d’un hashtag ironique et sarcastique : #VraieFemmeAfricaine.

Un hashtag pour dénoncer la condition de la ‘’femme africaine’’

Le 08 mars, on le sait, c’est la journée internationale des droits de la femme. Pour l’occasion, chaque année en Côte d’Ivoire, à coup sûr, l’on a droit à des activités gouvernementales et associatives. Discours fleuris, dons de machines à coudre et immanquable défilés de femmes en uniformes pagnes meublent forcement ce genre d’activités. 

Certainement en rébellion contre une telle habitude, jugée creuse et vide d’actions de changement, une jeune femme ivoirienne décide d’agir. Traoré Mariam Bintou créée ainsi un hashtag pour interpeller les consciences sur la condition de la ‘’femme africaine’’. Avec son hashtag #VraieFemmeAfrcaine, elle ironise sur les clichés de la ‘’société africaine ’’ et sur les réflexions de certains hommes. 

Rapidement, son hashtag de dénonciation emporte alors l’adhésion de nombreuses femmes et aussi de plusieurs hommes. De même, toujours sous le voile de l’ironie, les cœurs s’ouvrent, les langues se délient et les frustrations accumulées s’évacuent. Chacun y va de son commentaire. Et, de toutes parts, les réactions se comptent ainsi par milliers. Exemples :

UneVraieFemmeAfricaine
Pfffff !

Au point que, même certaines entreprises privées et des établissements bancaires sont entrés dans la danse. Car dans le pays, il faut le dire, la tendance de communication digitale est de surfer sur les buzz en cours. 

Tchiza = maîtresse

Il ne faut donc pas se voiler la face. Le premier intérêt de telles communications est ailleurs. En effet, il est surtout de vendre des produits et s’attirer la sympathie des consommateurs.

Mais, quoiqu’il en soit, l’on ne peut refuser de s’en satisfaire. Toute cette communication contribue à attirer plus de lumières sur cette campagne en ligne pour la cause des femmes.

#VraieFemmeAfricaine ou l’exaspération des violences à l’égard de la femme

En outre, comme on peut le constater, le hashtag passe surtout au scanner les travers de la société ivoirienne concernant les femmes. Travers qui vraisemblablement pourraient concerner plusieurs autres pays, africains ou non. Et mieux, sous ce hashtag, il y a aussi une volonté réelle de dénoncer toutes les violences dont sont victimes plusieurs femmes, jeunes filles et même des nourrissons.

D’ailleurs, il faut le dire, le contexte actuel en Côte d’Ivoire est à l’exaspération. Dans l’actualité du pays, deux phénomènes sont les plus récurrents, nauséabondes et révoltants.

Premièrement et sans surprise s’affiche le viol avec ses variantes hideuses. En effet, l’on enregistre ces derniers temps la recrudescence de la laide pratique du viol d’enfants.  De surcroît, des enfants de moins de 05 ans en sont victimes. Quel crime odieux ! Quelle horreur ! 

Une fillette de 03 ans violée.

A côté de cela, aussi, il existe une autre lugubre pratique de viol. Des jeunes filles, endormies ou drogués, sont sexuellement abusées. Leurs agresseurs sont souvent un membre de la famille nucléaire ou éclatée. En Côte d’Ivoire, la terrible pratique est connue sous l’euphémisme de « Chat noir ».

En effet, idiotement dans l’entendement populaire, on lui accorde une gravité moindre. La question est souvent même abordée avec amusement et avec une certaine fierté par leurs auteurs. Au point que, en raison d’une certaine complaisance des garants de la loi, une telle pratique perdure malheureusement. Notons que moins de 20% des instructions pour viol aboutissent à une condamnation.

Le projet Stop aux chats noirs.

Deuxièmement, le phénomène que je classe avant l’excision est le fait de battre son conjoint. C’est un phénomène qui me révolte aussi personnellement. Je n’arrive pas à me l’expliquer. Aucune raison valable ne pourrait justifier un tel acte. Aucune !

Les statistiques de femmes ainsi violentées dans le monde montrent l’ampleur du problème. On n’imagine à peine les effets psychologiques d’une telle pratique sur la victime et sur les enfants. Quelle détestation !

Leçons d’une campagne en ligne

En somme, et pour revenir à notre hashtag à succès, l’on peut en tirer deux voire trois conclusions. Tout d’abord, sans faire le diplomate et concernant la commémoration du 08 mars, nos États doivent arrêter les opérations cosmétiques. Celles qui consistent à mener des activités bling-bling sans réelle valeur ajoutée. Et, destinées à faire les grands titres sur les chaînes de propagande publique.

Il faut plutôt penser à créer de l’impact réel. En cela, les jeunes générations de femmes peuvent apporter des idées novatrices comme nous pouvons le constater avec le hashtag. Pourvu qu’on les implique, respecte et accepte leurs approches différenciées de la question.

Ensuite, faisant fi des dérives de certaines passionnées et extrémistes dans leur utilisation du hashtag, il faut reconnaître une chose. C’est que le hashtag ironique a aussi été une thérapie psychologique pour de nombreuses femmes et hommes. Tous ont joué le jeu du #MeToo ivoirien. Car en réalité, il s’agissait de critiquer la condition de la femme encore exécrable et de défendre des droits humains.

Enfin, toute cette histoire devrait faire réfléchir ceux qui doutent malgré tout de la force d’influence des réseaux sociaux. Un simple message d’une femme exacerbée posté sur Facebook a suffi pour susciter une vague d’indignation collective. Ainsi, il ne faut pas sous-estimer le travail en ligne accompli par les ‘’femmes aigries’’ sur les réseaux sociaux. Car de nos jours, une bonne communication via les réseaux sociaux produit autant de résultats que celles d’ONG de terrain.

Je ne saurais conclure mon propos sans toutefois vous partager de manière ironique et sarcastique cette citation.

« Il faut améliorer la condition féminine : par exemple agrandir les cuisines, baisser les éviers ou mieux isoler les manches des casseroles. »

Georges Wolinski.

A lire aussi : Lutter pour les droits des femmes d’aujourd’hui et de demain, la responsabilité de tous !


Réseaux sociaux en période électorale : les bloquer est une bêtise

Depuis une décennie maintenant, on connaît bien le disque des démocratures africaines pour couper internet ou les réseaux sociaux. Morceau choisi, lutter contre les infox en période électorale et préserver l’ordre public. Mais ce que l’on connaît moins, c’est que des acteurs sociaux importants paraissent légitimer de telles pratiques. Décryptons !

Ces dernières années, l’Afrique est également passée championne de la coupure d’internet ou des réseaux sociaux. Des dizaines de millions de citoyens ont ainsi été privés de communication virtuelle pendant plusieurs heures ou jours. Officiellement, les objectifs sont presque toujours les mêmes. Stopper la diffusion virale de propos haineux et appelants à des violences en période électorale.

Assalé Tiémoko : et si on coupait les réseaux sociaux…

Cet argumentaire sus évoqué, dont l’efficacité reste encore à prouver, semble de même séduire certaines personnalités. Assalé Tiémoko, journaliste d’investigation et maire, patron du satirique journal l’Éléphant déchaîné, semble aussi partager un tel raisonnement.

Choqué par la résurgence et la dangerosité des infox en ce début d’année électorale ivoirienne, Assalé écrira sur Facebook :

« Je me demande si du 30 octobre au 03 novembre [2020, période encadrant l’élection présidentielle ivoirienne], il ne faudra pas couper les réseaux sociaux pour que les informations conscieusement fabriquées ne provoquent pas l’embrasement général du pays. ».

Sa page Facebook, janvier 2020

Cet extrait de sa publication sur Facebook suscitera de nombreuses réactions.

Le perspicace journaliste confessera plus tard qu’il entendait surtout ajouter au débat électoral ivoirien la gouvernance des réseaux sociaux. Car bon nombre de concitoyens africains, à l’approche d’échéances électorales, n’ont pas suspecté un blocage des réseaux sociaux.

Le blocage des réseaux sociaux, une arme de censure

Concernant la Côte d’Ivoire donc, il y a quelques années, Bruno Koné, porte-parole du gouvernement, avait une déclaration ambivalente :

« Nous avons les moyens de bloquer l’accès à Facebook, mais nous ne le ferons pas. […] Nous allons sensibiliser les utilisateurs et si ça ne marche pas, nous allons prendre dans l’avenir des restrictions sur l’accès à certains sites comme le font d’autres pays ».

Déclarations à la sortie de conseil de ministres, janvier 2017

Les exemples de blocage des réseaux sociaux sont, en effet, faciles à trouver à partir de Google. La Gambie, le Gabon, le Tchad, la République du Congo, l’Ouganda ou même le Bénin ont eu recours à une coupure d’internet ou des réseaux sociaux à la veille d’élections. L’histoire écrite, par la suite, dans tous ces cas, nous en dit long sur les véritables intentions d’une telle pratique.

Aujourd’hui, les techniques et les capacités de blocage ne manquent pas. Les régimes africains ont ainsi acquis une certaine expertise. Le tout internet n’est pas forcément coupé. Car il faut permettre aux réseaux bancaires, aux entreprises et autres administrations de fonctionner normalement.

Un blocage ciblé est souvent préférée. Avec la coopération des agences de télécommunications et de fourniture d’internet, des services spécifiques peuvent être bloqués. Whatsapp, Twitter, Facebook, Messenger, Instagram, Snaptchat, Linkedin, Youtube et même les SMS peuvent être uniquement bloqués.

Selon l’avis de spécialistes, il semblerait que certains pays africains aient également recours à des outils de surveillance et d’espionnage. Notamment, à des appareils d’interception et de géolocalisation des télécommunications comme l’« IMSI Catcher ».

La note salée des blocages d’internet ou des réseaux sociaux

Le débat de la censure des réseaux sociaux mis sur la table, le plus important à présent est de s’organiser. Cela, pour éviter que cette pratique, qui gagne du terrain, ne se réalise en Côte d’Ivoire tout particulièrement. Car, d’une part, cette pratique porte atteinte aux droits et aux libertés numériques des citoyens. Et d’autre part, elle a également une incidence sur l’activité l’économique du pays.

Concernant les droits et libertés numériques dans un contexte électoral, Cheikh Fall, président de Africtivistes, déclare ainsi que :

« La suspension d’Internet empêche les citoyens de prendre la parole, de s’exprimer librement, de faire le travail de veille et de monitoring dans le scrutin présidentiel et de se positionner comme des observateurs indépendants, capables de produire du contenu. […] Couper Internet favorise la magouille et permet à ceux qui organisent les élections de faire valider des chiffres par les instances décisionnelles. C’est une sorte de production de contenu à sens unique. Les observateurs indépendants n’ont ainsi pas les moyens de contester ni fact-checker ni de corriger ni de commenter les résultats qui sont envoyés et produits. »

Déclarations faites à Suptnik

Julie Owono, directrice exécutive d’Internet sans Frontières, insiste également sur les pertes économiques et les suspicions créées.

Selon une étude menée par Top10VPN.com, le blocage d’Internet ou des réseaux sociaux coûte très cher. En Afrique subsaharienne, la perte financière est estimée à 2, 16 milliards de dollars pour 7 800 heures de blocage. L’Agence Ecofin en a fait aussi une très belle infographie que voici :

Agir contre un blocage d’internet ou des réseaux sociaux

Au regard du développement fait, agir pour prévenir une coupure d’internet ou des réseaux sociaux s’impose.

Concernant la Côte d’Ivoire, je reste convaincu qu’elle refusera d’emprunter la voie autoritaire du blocage d’internet ou des réseaux sociaux. À tout le moins, elle mettra sur pied une unité spéciale de surveillance des réseaux sociaux en période électorale. Le but étant, non pas de censurer les opinions, mais uniquement de traquer les auteurs d’infox violant la loi.

Cependant, objectivement, pour parer à toutes éventualités, la société civile et les organes de presse pourraient coaliser leurs forces. Par exemple, dans un projet commun, une collaboration entre les journalistes de divers médias ivoiriens pourrait être mise en place. Objectif, fact-checker des propos et publications tendancieuses susceptibles de mettre en mal la paix sociale durant la période électorale. À cela, bien d’autres projets ou initiatives de contournement peuvent être pensés.

Les cyber-citoyens, quant à eux, devraient vérifier les informations reçues avant de les partager et se conformer à la loi.

In fine, notons qu’Internet et les réseaux sociaux sont aujourd’hui intimement liés aux processus électoraux. Il faut qu’ils soient ouverts, libres et sécurisés pour tous afin de participer à des élections transparentes et apaisées.

Lire aussi : Médias sociaux, bons ou mauvais pour la démocratie ?


Migration clandestine de jeunes africains

Les voyages éducatifs hors du continent, une solution

Aujourd’hui, en 2020, la question de la migration reste l’un des défis majeurs au niveau mondial. Les initiatives pour résorber cette crise migratoire sont nombreuses. Cependant, il faut reconnaître que la plupart des initiatives menées tendent à dissuader de migrer. Face au repli et à la logique sécuritaire qui gouverne souvent les questions migratoires, de nouvelles propositions doivent être envisagées. Elles devront favoriser des flux migratoires sûrs, ordonnés et réguliers. C’est tout le sens de l’adoption, par l’Assemblée générale des Nations Unies, du Pacte mondial sur les migrations.

Notre proposition pour une migration sûre, ordonnée et régulière de jeunes Africains part d’une tragique histoire. Celle d’un adolescent ivoirien disparu à Abidjan et retrouvé dans le train d’atterrissage d’un avion en France. Retour sur cette affaire que avons recoupé en nous basant sur la version officielle fournie par les autorités ivoiriennes.

Voir la tour Eiffel avant de mourir…

Laurent Barthélémy Ani Guibahi ambitionne de devenir scientifique. Il a soif d’aventures et de découvertes. Barthélémy rêve constamment d’Espagne, de Portugal, d’Allemagne et de France. Il veux voir la tour Eiffel.

Pour donner vie à ses rêves, Barthélémy, semble-t-il, conçoit un plan à la Michael Scofield. Aussi invraisemblable que cela puisse paraître, il envisage de ridiculiser le système de sécurité de l’aéroport international Félix Houphouët Boigny d’Abidjan.

Certainement, il prépare son coup en longeant le site où il repère des failles de sécurité. Entre autres, il note sûrement une clôture endommagée, les horaires de vigilance relâchée des soldats, le timing d’atterrissage et de décollage des aéronefs…

Le moment venu, Barthélémy, dit-on, camouflé comme par magie, arrive sur le tarmac de l’aéroport. Et là, il se hisse incognito dans le train d’atterrissage d’un avion à destination de Paris.

L’avion amorce son décollage. Mais malheur assuré, l’infortuné n’a aucune chance d’arriver saint et sauf. La pression atmosphérique et le bas niveau de température condamnent notre futur scientifique aux yeux pleins d’étoiles. La suite, on la connaîtra par le biais des médias. Le corps congelé de l’enfant est ainsi retrouvé à 7 263 Km à Paris, loin de chez lui.

Barthélémy était un jeune collégien de 14 ans. Son rêve était de voir la tour Eiffel. Il ne la verra plus que depuis l’au-delà. Quel drame !

Reportage de France 24

Encourager la migration régulière par des programmes scolaires de voyages de découverte

Cet épisode hallucinant pose de multiples questions. Bien sûr, il se pose les questions de sécurité des aéroports, puis celles de la gouvernance des Etats africains comme celui de Côte d’Ivoire. Mais concentrons nous surtout sur la question de la migration – celle en direction des pays du nord.

En Afrique comme ailleurs, les très jeunes rêvent de découvrir le monde que l’on dit être un village planétaire. Ils désirent avoir une chance de voyager quelque peu égale à celle dont peuvent bénéficient plusieurs de leurs ami.e.s des pays du nord.

C’est pourquoi, en terme de proposition, il faut penser offrir, aux plus jeunes notamment, des possibilités de migration régulière pour assouvir ce besoin naturel de curiosité. Se faisant, qu’il soit mis en place des projets sociaux de voyage et de découverte culturelle de courte durée vers l’Europe pour les jeunes élèves des lycées et collèges. Ces projets pourraient être entièrement soutenus par les nombreuses organisations et représentations diplomatiques qui travaillent sur le sujet de la migration.

Cette proposition n’est certainement pas nouvelle. Mais l’idée est surtout de renforcer la communication positive autour de la question de la migration. Car on le constate tous, faire peur par de terribles images ne décourage pas forcément les ambitions de la migration clandestine. Il faut donc miser sur des stratégies positives pour une migration sûre, ordonnée et régulière.

Je souhaite vivement qu’un tel projet soit réalisé dans l’établissement d’origine de Laurent Barthélémy Ani Guibahi. Cela afin de se remémorer les raisons à l’origine d’un tel projet, et faire connaître les voies pour migrer de manière sûre. Car, il faut le répéter encore une fois, migrer est un droit.

S’engager pour une migration sûre, ordonnée et régulière.

À lire aussi : La migration clandestine, une autre traite négrière, vue par le cinéma.