#VraieFemmeAfricaine, le hashtag ironique qui libère la parole de la femme sur sa condition

Article : #VraieFemmeAfricaine, le hashtag ironique qui libère la parole de la femme sur sa condition
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3 mars 2020

#VraieFemmeAfricaine, le hashtag ironique qui libère la parole de la femme sur sa condition

Pour commémorer la journée internationale des droits de la femme, en lieu et place des défilés en uniforme pagne, des femmes ivoiriennes ont choisi une autre approche. Elles ont ainsi décidé de tordre le cou aux préjugés sociaux relatifs à la condition de la femme. Sur les réseaux sociaux, ces femmes s’expriment et conscientisent au travers d’un hashtag ironique et sarcastique : #VraieFemmeAfricaine.

Un hashtag pour dénoncer la condition de la ‘’femme africaine’’

Le 08 mars, on le sait, c’est la journée internationale des droits de la femme. Pour l’occasion, chaque année en Côte d’Ivoire, à coup sûr, l’on a droit à des activités gouvernementales et associatives. Discours fleuris, dons de machines à coudre et immanquable défilés de femmes en uniformes pagnes meublent forcement ce genre d’activités. 

Certainement en rébellion contre une telle habitude, jugée creuse et vide d’actions de changement, une jeune femme ivoirienne décide d’agir. Traoré Mariam Bintou créée ainsi un hashtag pour interpeller les consciences sur la condition de la ‘’femme africaine’’. Avec son hashtag #VraieFemmeAfrcaine, elle ironise sur les clichés de la ‘’société africaine ’’ et sur les réflexions de certains hommes. 

Rapidement, son hashtag de dénonciation emporte alors l’adhésion de nombreuses femmes et aussi de plusieurs hommes. De même, toujours sous le voile de l’ironie, les cœurs s’ouvrent, les langues se délient et les frustrations accumulées s’évacuent. Chacun y va de son commentaire. Et, de toutes parts, les réactions se comptent ainsi par milliers. Exemples :

UneVraieFemmeAfricaine
Pfffff !

Au point que, même certaines entreprises privées et des établissements bancaires sont entrés dans la danse. Car dans le pays, il faut le dire, la tendance de communication digitale est de surfer sur les buzz en cours. 

Tchiza = maîtresse

Il ne faut donc pas se voiler la face. Le premier intérêt de telles communications est ailleurs. En effet, il est surtout de vendre des produits et s’attirer la sympathie des consommateurs.

Mais, quoiqu’il en soit, l’on ne peut refuser de s’en satisfaire. Toute cette communication contribue à attirer plus de lumières sur cette campagne en ligne pour la cause des femmes.

#VraieFemmeAfricaine ou l’exaspération des violences à l’égard de la femme

En outre, comme on peut le constater, le hashtag passe surtout au scanner les travers de la société ivoirienne concernant les femmes. Travers qui vraisemblablement pourraient concerner plusieurs autres pays, africains ou non. Et mieux, sous ce hashtag, il y a aussi une volonté réelle de dénoncer toutes les violences dont sont victimes plusieurs femmes, jeunes filles et même des nourrissons.

D’ailleurs, il faut le dire, le contexte actuel en Côte d’Ivoire est à l’exaspération. Dans l’actualité du pays, deux phénomènes sont les plus récurrents, nauséabondes et révoltants.

Premièrement et sans surprise s’affiche le viol avec ses variantes hideuses. En effet, l’on enregistre ces derniers temps la recrudescence de la laide pratique du viol d’enfants.  De surcroît, des enfants de moins de 05 ans en sont victimes. Quel crime odieux ! Quelle horreur ! 

Une fillette de 03 ans violée.

A côté de cela, aussi, il existe une autre lugubre pratique de viol. Des jeunes filles, endormies ou drogués, sont sexuellement abusées. Leurs agresseurs sont souvent un membre de la famille nucléaire ou éclatée. En Côte d’Ivoire, la terrible pratique est connue sous l’euphémisme de « Chat noir ».

En effet, idiotement dans l’entendement populaire, on lui accorde une gravité moindre. La question est souvent même abordée avec amusement et avec une certaine fierté par leurs auteurs. Au point que, en raison d’une certaine complaisance des garants de la loi, une telle pratique perdure malheureusement. Notons que moins de 20% des instructions pour viol aboutissent à une condamnation.

Le projet Stop aux chats noirs.

Deuxièmement, le phénomène que je classe avant l’excision est le fait de battre son conjoint. C’est un phénomène qui me révolte aussi personnellement. Je n’arrive pas à me l’expliquer. Aucune raison valable ne pourrait justifier un tel acte. Aucune !

Les statistiques de femmes ainsi violentées dans le monde montrent l’ampleur du problème. On n’imagine à peine les effets psychologiques d’une telle pratique sur la victime et sur les enfants. Quelle détestation !

Leçons d’une campagne en ligne

En somme, et pour revenir à notre hashtag à succès, l’on peut en tirer deux voire trois conclusions. Tout d’abord, sans faire le diplomate et concernant la commémoration du 08 mars, nos États doivent arrêter les opérations cosmétiques. Celles qui consistent à mener des activités bling-bling sans réelle valeur ajoutée. Et, destinées à faire les grands titres sur les chaînes de propagande publique.

Il faut plutôt penser à créer de l’impact réel. En cela, les jeunes générations de femmes peuvent apporter des idées novatrices comme nous pouvons le constater avec le hashtag. Pourvu qu’on les implique, respecte et accepte leurs approches différenciées de la question.

Ensuite, faisant fi des dérives de certaines passionnées et extrémistes dans leur utilisation du hashtag, il faut reconnaître une chose. C’est que le hashtag ironique a aussi été une thérapie psychologique pour de nombreuses femmes et hommes. Tous ont joué le jeu du #MeToo ivoirien. Car en réalité, il s’agissait de critiquer la condition de la femme encore exécrable et de défendre des droits humains.

Enfin, toute cette histoire devrait faire réfléchir ceux qui doutent malgré tout de la force d’influence des réseaux sociaux. Un simple message d’une femme exacerbée posté sur Facebook a suffi pour susciter une vague d’indignation collective. Ainsi, il ne faut pas sous-estimer le travail en ligne accompli par les ‘’femmes aigries’’ sur les réseaux sociaux. Car de nos jours, une bonne communication via les réseaux sociaux produit autant de résultats que celles d’ONG de terrain.

Je ne saurais conclure mon propos sans toutefois vous partager de manière ironique et sarcastique cette citation.

« Il faut améliorer la condition féminine : par exemple agrandir les cuisines, baisser les éviers ou mieux isoler les manches des casseroles. »

Georges Wolinski.

A lire aussi : Lutter pour les droits des femmes d’aujourd’hui et de demain, la responsabilité de tous !

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